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Vengeuses Masquées - Le Blog
24 juin 2014

Excision made in Suède


Au détour d’une info, je tombe sur un, puis deux, puis trois articles parlant de ces quelques 60 cas de mutilation génitale découverts depuis le mois de mars en Suède, à Norrköping. Dont une classe entière de fillettes, 30 en tout, excisées. Sur les 30, 28 avaient été soumises à une excision appelée de type III, ou infibulation, la forme la plus extrême. Ces mutilations ont été découvertes par les services de médecine scolaire.

Les mutilations sexuelles féminines sont interdites par la loi suédoise et sont passibles de 4 ans de prison (4 ANS ???). Si des circonstances aggravantes sont retenues, cette peine peut atteindre 10 ans. Depuis 1999, le fait que les mutilations soient pratiquées à l’étranger est aussi reconnu comme infraction.

La plupart des filles subissent cette mutilation à vif, sans anesthésie, et généralement sans conditions d’hygiène, entre les âges de 4 et 14 ans, mais elle est aussi parfois pratiquée sur des bébés, des nourrissons.

On observe le même phénomène qu’en France à l’approche des grandes vacances. Les filles partent en vacances « au pays » et en reviennent excisées, parfois même contre la volonté des parents. F avait écrit un très bel article à ce sujet il y a peu, allez le lire ou le relire là : https://www.facebook.com/VengeusesMasquees/posts/842642559085182:0


L’excision en schémas
(parce que les images et la description sont insoutenables), ça donne ça :

schemas

(Source : l’excellent mémoire de Manuela Goncalves, sage-femme, disponible ici : http://www.gynsf.org/MSF/memoiremanuellagoncalves.pdf)

 

Qu’en est-il de la pratique en France ?

Je cite textuellement le mémoire ci-dessus (il date de 2006) :

« En France, les mères veulent faire exciser leurs filles le plus tôt possible, tout d’abord pour qu’elles n’aient aucun souvenir sur ce qu’elles ont subi, mais aussi pour qu’il n’y ait aucune résistance de leur part surtout lorsqu’elles sont scolarisées. Elles sont ainsi réticentes à attendre le retour en Afrique pour l’excision de leurs filles qui sont alors excisées très jeunes, de quelques jours à un an. Parfois les excisions ont lieu plus tardivement car les fillettes d’une même fratrie sont souvent opérées le même jour. Comme il s’agit d’une décision collective, elles peuvent être excisées en Afrique (lors d’un voyage pendant les vacances scolaires par exemple), parfois avec la désapprobation d’un ou des deux parents biologiques.

Par ailleurs, en France, il n’y a pas de processus initiatique. Ainsi, il ne s’agit plus tant de passer de l’état de fillette qu’à celui de femme, mais plus d’être marquée dès la naissance comme étant du sexe féminin. Cette généralisation de l’abaissement de l’âge (qui se produit également en Afrique), assimile l’excision à une «simple formalité de naissance ».

Comme nous l’avons dit précédemment, la souffrance entraînée par l’excision est telle qu’il est souvent inconcevable pour une mère d’exciser sa fille. Les mutilations sont donc réalisées par des exciseuses spécialisées dont le s familles se transmettent les adresses. Il s’agit parfois d’une personne « non qualifiée » (au sens coutumier) pour pratiquer l’excision, mais d’une femme qui pour gagner de l’argent s’improvise exciseuse. De plus, ces exciseuses n’habitent pas toujours en France et ce sont dans ce cas les familles qui se cotisent pour les faire venir d’Afrique.

Les parents ne se préoccupent pas du type d’excision pratiquée par l’exciseuse, beaucoup ignorant l’existence de plusieurs types de M.S.F.

L’opération se déroule habituellement au domicile familial. Elle peut également être réalisée au domicile de l’exciseuse ou dans un foyer d’hébergement de travailleurs migrants. »

En 2006, on estimait entre 45000 et 60000 le nombre de femmes et fillettes mutilées ou menacées de l’être. Les derniers chiffres officiels datent de 2004, l’INED estimait ce chiffre à 53000 femmes, et à 30% le nombre de leurs filles menacées de l’être.


Du point de vue de la Justice :

En 1983, un arrêt de la cour de cassation définit « l’ablation du clitoris résultant de violences volontairement exercées » comme une mutilation, donc un crime au sens du code pénal français. De ce fait, l’acte d’excision devient passible des assises. La peine encourue étant, selon l’article 222-9 et 222-10 du nouveau Code Pénal, de 10 ans de réclusion criminelle à 20 ans lorsque la mutilation est commise sur un mineur de 15 ans par un ascendant légitime ou toute autre personne ayant autorité sur l’enfant. La loi considère le complice comme criminel et prévoit à son endroit une peine identique à celui commettant l’acte.

Près de 40 procès d’assises entre 1983 et 2006, concernant 80 petites filles dont 4 sont mortes d’une hémorragie consécutive à leur excision. Les peines sont le plus souvent assorties de sursis.

En 1988, 1er procès et 1ère condamnation par une Cour d’Assises pour excision (Cour d’Assises du Val d’Oise, 3 ans d’emprisonnement avec sursis à des parents (mari et ses deux femmes).

En 1991, 1er procès et condamnation d’une exciseuse pour avoir mutilé 6 fillettes d’une même famille (Cour d’Assises de Paris, 5 ans de prison ferme).
Cherchez l’erreur, elle a de nouveau été condamnée en 1993 à 5 ans de prison dont 1 an ferme (personnellement je trouve que ces chiffres font honte et sont une honte et une grosse claque dans la gueule des victimes) pour avoir excisé 17 fillettes, dont un bébé de 3 mois décédée suite à sa mutilation.

En 1993, 1ère condamnation de prison ferme pour une mère ayant fait exciser ses filles (Cour d’Assises de Paris, 3 ans avec sursis et 1 an ferme).

En 1996, 1ère condamnation d’un père ayant fait exciser sa fille en Afrique, contre l’avis de sa mère (Cour d’Assises de Bobigny, 1 an avec sursis).

En 1999, 1er procès déclenché par une jeune fille excisée dans son enfance sur plainte de la victime contre ses parents et l’exciseuse (8 ans de prison pour l’exciseuse et 2 ans pour la mère). L’exciseuse, qui avait mutilé des centaines de bébés et fillettes, a depuis remis sa pratique en question et ne mutile plus.


Plus récemment :

En 2011, les parents de 4 jeunes filles (11 à 19 ans) déférés au tribunal d’Evry reconnaissent avoir fait exciser 2 de leurs filles en France par une professionnelle en 1994 et 1996.

En 2012, les parents de 4 jeunes filles (11 à 21 ans) excisées à leur domicile ont été condamnés à 2 ans de prison ferme pour le père et 18 mois de prison ferme pour la mère.


Ailleurs :

En 2007, première procédure pénale en Suisse d’un couple ayant fait excisé leur fille de 2 ans à leur domicile par une exciseuse venue de Somalie.

En Allemagne, 20000 femmes concernées selon l’ONG Terre des femmes. Peu de répression, mais beaucoup d’information. Les lois appliquées sont celles des coups et blessures.

En Grande-Bretagne, l’excision est interdite, même si elle est pratiquée à l’étranger. Malgré l’interdiction, les tribunaux britanniques n’ont encore jamais infligé de peine pour le délit d’excision.

En 2012, première résolution de l’ONU dénonçant les mutilations génitales féminines, soutenue par plus de 110 pays, dont une cinquantaine de pays africains, demandant aux Etats-membres de "compléter les mesures punitives par des activités d'éducation et d'information ».

En 2012, 1re condamnation en Côte d’Ivoire de 9 exciseuses.


En chiffres :

L’excision serait pratiquée dans 29 pays d’Afrique et du Moyen Orient et, dans une moindre mesure, dans certaines communautés en Asie (Malaisie, Indonésie, Irak, Inde, Pakistan), en Amérique du Sud (Colombie, Pérou) ainsi que parmi les communautés de la diaspora dans les pays industrialisés (Europe, USA, Canada et Australie). La prévalence varie considérablement, à la fois d’une région à l’autre, et d’un pays à l’autre, et au sein d’une même région ou d’un même pays, l’appartenance ethnique étant le facteur le plus décisif.

Dans le monde, on estime que 3 millions de filles, pour la majorité de moins de 15 ans, sont soumises à la pratique chaque année  et que 140 millions l’ont déjà subie (Chiffres du Fonds des Nations Unies pour la Population (FNUAP)).

carte


Un après ? La chirurgie réparatrice

Depuis une dizaine d'années, une technique de réparation du clitoris après excision a été mise au point par le Dr Pierre Foldès, un chirurgien urologue français très engagé dans la cause des femmes, que ce soit en matière d’excision ou de violences faites aux femmes. Aujourd'hui, cette opération est pratiquée dans une dizaine d'hôpitaux en France, est considérée par la Sécu comme chirurgie réparatrice, et prise en charge à 100%.


Excision/Infibulation

Créé par l’homme, perpétrée par les femmes sur les femmes depuis le néolithique, une origine païenne, bien avant l’émergence des religions monothéistes, une mutilation que l’on associe bien facilement au continent africain, en oubliant commodément que la clitoridectomie a fait partie intégrante de la médecine en Europe et aux Etats-Unis, réputée soigner l’hystérie, la migraine, l’épilepsie, la nymphomanie…ou plus prosaïquement purger l’organisme féminin du diable censé s’y loger. Pratiquée de manière officielle jusqu’en 1925. Le dernier cas recensé d’excision en tant que traitement médical date de 1948, il s’agissait d’une fillette de 5 ans, en Angleterre. Rendons à César ce qui lui appartient et assumons nous aussi, continents prétendument développés, d’avoir mutilé nos femmes et nos filles pour les calmer.

« Lorsqu’une coutume traverse les ethnies, les classes sociales, les formations économiques les religions, les continents... ce n’est plus une coutume, c’est une politique. Admettons qu’une coutume ne se juge pas, du moins de l’extérieur, une politique inversement se juge et se combat de l’extérieur comme de l’intérieur ».
(S. Auffret)

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Pour qu'un jour, on en parle au passé, partout, pour toutes...

B.

Sources :
http://www.ldif.asso.fr/?theme=excision&n=28
http://www.excisionparlonsen.org/cncdh-avis-sur-les-mutilations-sexuelles-feminines/
http://www.thelocal.se/20140620/swedish-school-class-genitally-mutilated
http://www.breitbart.com/Breitbart-London/2014/06/20/Female-genital-mutilation-in-Sweden-all-30-girls-in-one-class-cut#
http://anesf.com/wp/?p=4630
http://www.ined.fr/fr/tout_savoir_population/fiches_actualite/mutilations_sexuelles_feminines_france/

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