"Notre société est malade, épisode 3452 : Tant que tu lui plais, c'est le principal (sic)"

"Qui parmi nous a déjà prononcé cette phrase?"

Quelques mains timides se lèvent dans l'assemblée, il faut dire que le titre ne donne pas envie d'assumer ce qu'on a pu dire un jour.

"Qui parmi nous a déjà entendu cette phrase?"

Toutes les mains, ou presque se lèvent. Pas de surprise face à ce soulèvement massif.

"Que pensez-vous de cette phrase? Je vous écoute".

X se lève, un peu timide et avance :

"Que ça ne sert pas à grand chose?"

"De fait, et pourquoi cela ne sert pas à grand chose?"

Y se lance :

"Parce que c'est faux! On doit se plaire à soi-même avant toute chose!"

Je poursuis, en souriant :

"C'est exactement cela. L'estime de l'homme que l'on aime ne peut suffire à nous définir. Il est vrai que l'estime de soi se nourrit de feedback positifs, et négatifs. Mais pas seulement, nous avons aussi notre rôle à jouer! Moi par exemple.."

Z m'interrompt, me regarde droit dans les yeux et me questionne, avec assurance.

"Dis moi Quatre, nous participons à une conférence pour le développement personnel, ou bien on est là pour causer féminisme?"

"Je t'attendais Z, exprime toi. Qu'est ce qui, selon toi, est problématique dans cette phrase?"

Z prend un profonde inspiration et se lance.

"Le soucis majeur de cette phrase réside dans le fait qu'elle sous entend que nous nous définissons par le regard de l'homme, c'est extrêmement sexiste".

Je souris et l'invite à poursuivre.

"Chaque jour, nous nous plaignons du patriarcat, de notre rôle mésestimé dans les différentes sphères de notre vie. Et pourtant, nous continuons de véhiculer cette image. Nous acceptons d'être objectivées, d'être définies en tant que <>.  Nous demandons l'égalité salariale, la liberté sur notre corps, mais nous cautionnons implicitement l'idée que l'autre sache mieux que nous, que lui seul soit apte à nous juger. 

Personnellement, je déteste entendre des femmes critiquer leur physique. Ça me peine de les savoir si critiques envers elles, ça me peine de savoir que leurs jugements, positifs comme négatifs, se portent en priorité sur leur apparence, c'est vrai.

Cependant, ce qui me peine le plus, c'est qu'on leur interdit de ressentir, de s'accepter ou non, le regard de l'autre prime.

C'est sexiste, ça me gonfle, mais surtout, ça donne lieu à de multiples travers. Pensez à ces femmes, qui se trouvaient belles, jusqu'à ce qu'elles tombent sur un compagnon un poil superficiel. Penser à ces jeunes femmes qui se trouvent intelligentes mais sont accompagnées d'un homme qui estime que leur rôle se cantonne au foyer et à l'éducation des enfants. Pensez à ces femmes maltraitées durant des années, à qui l'on parle de divorce, et qui n'arrivent à franchir le pas. 

Ne pensez-vous pas qu'on devrait leu apprendre qu'elles sont libres? Ne pensez-vous pas qu'il serait temps qu'elles se sentent libre de penser par elle-même?"

Z se rassied, le rouge aux joues, l'œil brillant, légèrement essoufflée. Elle est fière de sa tirade, je suis fière de la part féministe en moi.

Cette conférence n'a existé que dans ma tête, et le temps de quelques mots posés. Le temps de clarifier quelques idées.

Quatre